Attaque massive : Israël bombarde l’Iran, visant ses installations nucléaires et ses responsables militaires

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Benyamin Nétanyahou affirme avoir frappé «le cœur du programme nucléaire militaire» de Téhéran. Le chef des Gardiens de la révolution et plusieurs figures militaires et scientifiques ont été tués, confirment les médias officiels iraniens.

Israël a mené dans la nuit de jeudi à vendredi des dizaines de frappes aériennes contre l’Iran, ciblant son programme nucléaire, des installations militaires, plusieurs hauts commandants et des scientifiques de premier plan, dans une attaque massive et inédite qui rapproche un peu plus le Moyen-Orient d’un nouvel embrasement.

Cette opération, baptisée «Rising Lion» selon le Premier ministre israélien, avait été planifiée pendant des mois et approuvée lundi par Benyamin Nétanyahou et son ministre de la Défense, selon des sources officielles israéliennes.

D’énormes explosions ont été entendues à travers Téhéran vers 3h30 du matin, heure locale, vendredi. Les premières vidéos et photos diffusées par des Iraniens sur les réseaux sociaux montraient de la fumée s’élevant de plusieurs quartiers de la capitale. Des explosions ont également été rapportées dans les villes d’Isfahan, Arak, Kermanshah et Tabriz, qui abritent des complexes militaires et industriels.

De multiples cibles frappées simultanément

Selon des hauts responsables iraniens cités par le New York Times, Israël a attaqué au moins six bases militaires autour de Téhéran, des domiciles dans deux complexes hautement sécurisés réservés aux commandants militaires, ainsi que plusieurs bâtiments résidentiels à travers la capitale, dans ce qui semble s’avérer des assassinats ciblés.

La télévision d’État iranienne a indiqué, images à l’appui, que le site de Natanz, l’un des deux principaux centres nucléaires du pays, avait été frappé, et que plusieurs figures militaires et nucléaires de haut rang avaient été tuées, dont le général de division Hossein Salami, chef des Gardiens de la révolution, Mohammad Mehdi Tehranchi, professeur de physique réputé, et Fereydoon Abbasi, ancien directeur de l’organisation iranienne de l’énergie atomique.

Les médias iraniens ont également confirmé la mort du général Mohammad Bagheri, chef d’état-major des forces armées iraniennes et deuxième plus haut commandant après le Guide suprême, ainsi que celle du général Gholamali Rashid, commandant adjoint des forces armées. Après avoir été hospitalisé en urgence, Ali Shamkhani, qui dirigeait les négociations nucléaires pour le compte du Guide suprême, a également succombé à ses blessures à la suite d’une frappe sur son domicile. L’agence de presse d’État IRNA a rapporté qu’au moins une douzaine de civils ont été tués dans les frappes à Téhéran seulement, où au moins deux bâtiments résidentiels se sont effondrés.

 

«Cette opération se poursuivra aussi longtemps qu’il le faudra»

Le Premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a déclaré qu’Israël avait «frappé au cœur du programme d’enrichissement nucléaire iranien»,affirmant que la cible principale était le site de Natanz ainsi que «le principal scientifique nucléaire de la République islamique». La télévision iranienne a diffusé des images montrant une épaisse fumée noire s’élevant du site, précisant que la frappe avait eu lieu vers 4 h 15.

«Cette opération se poursuivra aussi longtemps qu’il le faudra pour éliminer cette menace», a déclaré Netanyahou dans une déclaration vidéo. «C’est un danger clair et immédiat pour la survie même d’Israël», a-t-il ajouté, estimant que l’Iran pourrait «produire une arme nucléaire très rapidement. Cela pourrait être dans un an. Cela pourrait être dans quelques mois».

Dans une communication aux médias, un responsable militaire israélien a confirmé que des dizaines de frappes avaient été menées, dans ce qui semble être l’attaque la plus vaste et la plus meurtrière jamais lancée par Israël contre la République islamique. Cet officiel a déclaré que les services de renseignement israéliens avaient des indications ces dernières semaines que l’Iran «courait vers la bombe nucléaire» et disposait désormais de suffisamment de matériel pour assembler «quinze bombes nucléaires» en quelques jours.

Les Etats-Unis ont à plusieurs reprises nié toute implication dans cette offensive, qui survient quelques jours avant un sixième cycle de négociations entre Washington et Téhéran visant à résoudre la crise nucléaire par la voie diplomatique. Donald Trump a déclaré jeudi soir à Fox News que les États-Unis étaient au courant des frappes à l’avance mais n’étaient pas impliqués militairement, espérant que l’Iran reviendra à la table des négociations. Il a précisé que le CENTCOM était en état d’alerte maximale pour d’éventuelles représailles contre les cibles américaines. La veille, le président avait déclaré jeudi que les États-Unis étaient «relativement proches d’un bon accord», ajoutant qu’il ne souhaitait pas qu’Israël attaque l’Iran, car cela pourrait «faire capoter» les pourparlers. «Cela pourrait aussi les aider, en fait. Mais cela pourrait aussi tout faire échouer», a-t-il ajouté.

La Maison Blanche a fait savoir que Donald Trump tiendrait une réunion du Conseil de sécurité nationale dans la Situation Room à 11 heures (heure locale) vendredi. Les États-Unis ont retiré des diplomates d’Irak mercredi et autorisé le départ volontaire des familles du personnel militaire américain du Moyen-Orient par mesure de précaution. Plus de 40 000 militaires américains sont stationnés dans le Golfe Persique et ailleurs au Moyen-Orient, notamment le porte-avions Carl Vinson armé d’avions d’attaque F-35, qui navigue actuellement en mer d’Arabie.

 

Israël ferme son espace aérien

Dans une déclaration vidéo, Netanyahou a estimé que l’Iran ne faisait que «gagner du temps». «C’est pourquoi nous n’avons pas d’autre choix que d’agir, et d’agir maintenant», a-t-il déclaré.

Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a de son côté prévenu que son pays s’attendait à une riposte iranienne «par une attaque de missiles et de drones contre l’État d’Israël et sa population civile… dans un avenir très proche». Le chef d’état-major israélien, le général Eyal Zamir, a averti dans une allocution télévisée que la riposte de l’Iran serait probablement différente des contre-attaques précédentes : «Je ne peux pas promettre un succès absolu, le régime iranien tentera de nous attaquer en réponse, le bilan attendu sera différent de ce à quoi nous sommes habitués», a-t-il averti. Selon des officiels israéliens cités par Reuters, la réplique attendue de Téhéran pourrait prendre la forme d’un tir de centaines de missiles balistiques.

Israël a fermé son espace aérien et interdit la plupart des rassemblements non essentiels. L’aéroport Ben Gourion, principal aéroport du pays, a été fermé jusqu’à nouvel ordre. Des sirènes ont retenti à Tel Aviv et Jérusalem, poussant la population à se réfugier dans les abris. À Tel Aviv, qui se préparait pour sa parade annuelle de la Fierté, les bars et clubs ont immédiatement fermé et l’événement a été annulé après le déclenchement des sirènes. Toutes les écoles et la plupart des lieux de travail seront fermés vendredi. Les dirigeants politiques israéliens auraient été déplacés en lieu sécurisé.

L’Iran, de son côté, a suspendu tous les vols jusqu’à nouvel ordre tandis que l’Irak et la Jordanie, voisins des belligérants, annonçaient la fermeture temporaire de leurs espaces aériens respectifs.

 

Téhéran promet de riposter, Washington se distancie

La République Islamique a plusieurs fois averti qu’elle riposterait à toute attaque, réaffirmant cette semaine qu’il pourrait viser des bases américaines dans toute la région. Le porte-parole des forces armées iraniennes, le général Shekarchi, a déclaré à la télévision d’État qu’Israël et les États-Unis allaient «recevoir une gifle puissante» et que les forces armées iraniennes étaient préparées et riposteraient bientôt avec force. «Une attaque de représailles est certaine, avec l’aide de Dieu», a-t-il ajouté. Le Guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, a déclaré dans un communiqué lu à la télévision d’État qu’Israël «devrait s’attendre à un châtiment sévère. La main forte de la République islamique ne les lâchera pas».

Le chef de la diplomatie américaine Marco Rubio a déclaré dans un communiqué que Washington «n’est pas impliqué dans les frappes contre l’Iran et que notre priorité absolue est de protéger les forces américaines présentes dans la région». «Israël nous a informés qu’il considérait cette action comme nécessaire à sa légitime défense, a ajouté Rubio. Soyons clairs : l’Iran ne doit pas viser les intérêts ou le personnel des États-Unis».

Ces dénégations n’ont cependant pas convaincu les Gardiens de la révolution, l’organisation paramilitaire embarquant le vieil adversaire américain dans son communiqué d’appel à la vengeance : «L’attaque israélienne a été menée au su et avec le soutien des maudits dirigeants de la Maison Blanche et du régime terroriste des États-Unis».

Aux États-Unis, les réactions politiques apparaissent divisées. Le sénateur républicain Lindsey Graham a averti que l’Amérique devrait avoir une «réponse écrasante» si le personnel ou les installations américaines étaient ciblés, menaçant de détruire «toutes les raffineries de pétrole et infrastructures pétrolières de l’Iran». À l’inverse, son homologue démocrate Chris Murphy a critiqué l’attaque d’Israël, exprimant sa crainte qu’elle «provoque une guerre régionale probablement catastrophique pour l’Amérique». La sénatrice démocrate Elizabeth Warren a elle aussi exprimé son inquiétude : «Je suis rarement d’accord avec l’administration Trump, mais je pense important de souligner ici que nous avons besoin de davantage de négociations, d’une désescalade. Nous devons parvenir à un accord». L’émissaire de la Maison Blanche au Moyen-Orient, Steve Witkoff, a fait savoir qu’il espérait encore maintenir les tractations avec Téhéran portant sur un nouvel accord nucléaire, dont le prochain round était prévu dimanche.

 

Une situation atomique jugée «profondément préoccupante»

Chef de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), Rafael Grossi a confirmé que le site nucléaire de Natanz avait été ciblé et a qualifié la situation en Iran de «profondément préoccupante». L’AIEA«surveille étroitement» la situation, a-t-il communiqué, et est «en contact avec les autorités iraniennes concernant les niveaux de radiation» ainsi qu’avec ses inspecteurs présents dans le pays. Le New York Times affirme avoir vérifié des images montrant des flammes et une épaisse fumée noire s’échappant du complexe d’enrichissement nucléaire de Natanz peu après qu’une série d’explosions a été rapportée vers 4h18, heure locale. Une autre explosion a été signalée vers 5h56. Le journal américain rapporte que des publications sur Telegram font état de jusqu’à dix explosions sur le site, mais il n’est pas clair si les frappes israéliennes ont touché le complexe principal ou les batteries de défense antiaérienne qui l’entourent.

Ces frappes surviennent dans un contexte de tensions croissantes autour du programme nucléaire iranien. La veille des attaques israéliennes, le conseil des gouverneurs de l’AIEA avait adopté une résolution déclarant que l’Iran violait ses obligations de non-prolifération nucléaire – la première censure de ce type en vingt ans. Téhéran avait condamné cette résolution, la qualifiant de politiquement motivée, et avait annoncé son intention d’ouvrir un nouveau site d’enrichissement d’uranium.

Les marchés financiers mondiaux ont été aussitôt secoués par les frappes, de Tokyo à Hong Kong, tandis que les prix du baril de pétrole brut Brent bondissant de près de 9% pour atteindre 78 dollars dans l’heure suivant les attaques.

(Source : Liberation.fr)

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