Le professeur Coumba Ndofène Diouf, économiste et consultant, s’est récemment exprimé sur l’audit économique commandité par les nouvelles autorités sénégalaises. Lors d’une interview, il a analysé les résultats de cet audit mené par l’Inspection Générale des Finances et leurs implications pour l’économie nationale.
D’après le professeur Ndofène, le diagnostic est alarmant car, le rapport d’audit, présenté six mois après l’installation du nouveau régime, met en lumière une situation financière critique. « Le Premier ministre a révélé des irrégularités graves, notamment une absence de traçabilité pour une somme estimée à 1 800 milliards de FCFA. Cette situation soulève des préoccupations quant à la gestion des finances publiques sous le gouvernement précédent », déclare-t-il.
Le professeur ajoute : « Le rapport mentionne également l’existence de factures impayées totalisant 651 milliards de FCFA, pour lesquelles les biens acquis restent inconnus, tant au niveau de leur origine que de leur destination. » Selon lui, ces anomalies indiquent une mauvaise gestion des ressources publiques et soulèvent des questions de responsabilité politique.
Impact sur la Confiance des Partenaires Internationaux
Malgré les inquiétudes soulevées par l’audit, des bailleurs de fonds tels que la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International (FMI) ont salué la transparence du nouveau gouvernement. Ces institutions ont exprimé leur soutien conditionnel, en attendant la validation des résultats par la Cour des Comptes. Toutefois, le professeur Diouf note que la notation souveraine du Sénégal a été révisée à la baisse, conséquence de la situation économique héritée du précédent gouvernement. Cette dégradation s’explique par la gestion de Macky Sall, qui a laissé un lourd fardeau de dettes et un déficit budgétaire sous-estimé.
« Les nouveaux chiffres indiquent un déficit réel de 10%, contre les 5% annoncés initialement, et une dette publique s’élevant à 16 000 milliards de FCFA, soit bien au-delà des 13 000 milliards communiqués », précise-t-il.
Pour le professeur Ndofène Diouf, le modèle de développement adopté jusqu’à présent au Sénégal n’a pas permis de relancer efficacement l’économie. En comparant les performances du Sénégal à celles des “quatre dragons asiatiques” (Taïwan, Singapour, Corée du Sud et Hong Kong), il souligne que ces pays ont multiplié leur PIB par des dizaines de fois en 25 ans, contrairement au Sénégal, dont la croissance reste stagnante.
Il critique également le choix des régimes précédents de se concentrer sur des projets d’infrastructure coûteux, souvent perçus comme des symboles de modernité, mais qui ne constituent que la phase finale du processus de développement économique. Il préconise plutôt une approche endogène, axée sur le développement du capital humain et le soutien aux petites entreprises locales.
Les Quatre Axes Prioritaires pour une Nouvelle Stratégie Économique
Le professeur Diouf plaide pour une refonte du modèle économique sénégalais, basée sur quatre axes prioritaires :
- Développement du Capital Humain : Investir dans l’éducation, la santé et la formation professionnelle pour créer une main-d’œuvre active et innovante.
- Économie Endogène : Promouvoir une croissance initiée par les acteurs locaux, notamment les agriculteurs, les pêcheurs et les artisans, pour réduire la dépendance aux financements externes.
- Industrialisation Durable : Renforcer les capacités de production locale afin de diminuer les importations et valoriser les ressources nationales.
- Infrastructures Modernes : Développer les infrastructures en dernier lieu, une fois que les bases de l’économie sont suffisamment robustes pour les soutenir.
Cette approche, inspirée des réussites économiques asiatiques et d’autres pays émergents, vise à instaurer une croissance soutenue et inclusive.
Une Réforme Nécessaire pour une Gestion Financière Transparente
L’audit des finances publiques a révélé des pratiques de gestion préoccupantes sous le gouvernement précédent, marquées par une faible transparence et une mauvaise allocation des ressources. Le professeur Arona Coumba Ndofène Diouf appelle à une réforme profonde des politiques économiques pour corriger ces dérives et mettre le Sénégal sur une trajectoire de développement durable.
La transparence et l’intégrité dans la gestion des finances publiques seront cruciales pour regagner la confiance des citoyens et des partenaires internationaux, et pour amorcer une nouvelle dynamique de croissance économique. Le défi majeur du nouveau gouvernement est de redresser l’économie tout en mettant en œuvre des réformes structurelles, afin d’éviter les erreurs du passé et de construire un avenir prospère pour le Sénégal.