Récit glaçant d’un chauffeur sénégalais enlevé puis libéré au Mali : « On a cru que notre dernière heure était arrivée »

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Jeudi dernier, six chauffeurs routiers sénégalais ont été enlevés entre Kayes et Bamako, au Mali, par un groupe armé soupçonné d’être des djihadistes. Libérés au bout de quelques heures de détention, ils témoignent de leur calvaire. Parmi eux, Birane Ndiaye, chauffeur expérimenté de 24 ans de métier, raconte avec émotion cette mésaventure.

Une embuscade en plein jour

« Je m’appelle Birane Ndiaye. Je suis chauffeur routier depuis vingt-quatre ans. Originaire de Ndakhar Birima, dans la commune de Diolom Fall (département de Kébémer, région de Louga), je n’aurais jamais imaginé vivre un jour ce que nous avons traversé sur la route Dakar-Bamako. Ce jeudi-là, entre Kayes et Bamako, notre vie a basculé en quelques minutes ».

« J’étais au volant de mon camion, mon apprenti à mes côtés, quand soudain des hommes armés nous ont barré la route. C’étaient des djihadistes, lourdement armés. Ils nous ont interceptés sans laisser la moindre chance. Juste après nous, un autre camion venu de Bamako a subi le même sort. À bord, le chauffeur et son apprenti. Plus loin, un troisième véhicule en panne fut également pris. En tout, nous étions six Sénégalais entre leurs mains. C’était en plein jour, mais pour nous, la nuit venait déjà de tomber ».

Une nuit de Gamou sous la pluie 

« Ils nous ont conduits dans un endroit reculé, loin de toute trace de route. La nuit du Gamou, nous l’avons passée dans des conditions inhumaines. Couchés à même le sol, sur une simple bâche, sans abri. La pluie battante nous trempait jusqu’aux os, les moustiques nous dévoraient. Nous étions prisonniers, impuissants, sans savoir ce qui allait nous arriver. Cette nuit-là, j’ai sincèrement cru que nous allions mourir ».

La peur de l’exécution

« Au matin, ils nous ont déplacés vers un autre lieu. Le trajet se faisait dans un silence pesant, chaque pas résonnait comme une marche vers la mort. Je me souviens avoir pensé : c’est ici qu’ils vont nous égorger ou nous fusiller. Mais Dieu, dans sa grâce infinie, en a décidé autrement. En fin de journée, contre toute attente, ils nous ont ramenés sur la route et nous ont relâchés. Aucun mot, aucune explication. Juste la liberté ».

Un retour les mains vides

« Je rends grâce à Allah d’être encore en vie. Mais je suis sorti de cette épreuve dépouillé de tout. Mon camion, qui m’avait coûté plus de vingt millions, a été incendié avec toute sa cargaison. Mes papiers sont partis en fumée. Mon argent et mes biens, disparus. Quand je suis parvenu à Kidira après notre libération, je n’avais plus rien. Un ami m’a tendu 5 000 francs CFA. J’ai acheté un pantalon à 1 000, une chemise à 750, et avec le reste, je me suis débrouillé pour rentrer ».

Des larmes de gratitude

« Je tiens à remercier de tout cœur Baye Gora Khouma. Quand j’ai récupéré mon téléphone après notre libération, le premier message que j’ai entendu était le sien. Ses mots, son engagement à alerter et à se mobiliser pour nous sauver m’ont arraché des larmes. Il a été un pilier dans ce drame.

Aujourd’hui, malgré la perte matérielle immense, je dis Alhamdoulillah. Car le pire aurait été de laisser nos vies sur cette route maudite. Nous avons souffert l’enfer, mais nous sommes vivants. Et cela vaut plus que tout ».

(Source : L’Informe)

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