Face aux défis croissants liés à la gestion du foncier au Sénégal, le député Amadou Ba, membre du parti PASTEF, entend soumettre à l’Assemblée nationale une proposition de loi visant à suspendre temporairement, tout au moins jusqu’aux prochaines élections, la compétence des collectivités locales en matière foncière. Cette initiative, selon lui, est indispensable pour assurer un développement harmonieux du pays et éviter les dérives dans l’attribution des terres.
Selon Amadou Ba, l’actuel mode de gestion foncière entrave les projets d’aménagement et de construction menés par les structures publiques telles que la SICAP, la SN-HLM ou encore le ministère de l’Urbanisme. Il estime que le foncier, censé être un bien public, est devenu le premier facteur de renchérissement du logement social. « Le foncier, qui est censé être gratuit au Sénégal, devient de facto le premier coût de construction pour le logement social. Cela alourdit la facture », a-t-il déclaré lors d’une intervention médiatique sur Sanslimitesn.
Pour pallier cette situation, le député de Pastef propose que l’État reprenne la gestion du foncier à travers l’Agence nationale de l’aménagement du territoire (ANAT), qui est un démembrement du ministère de l’Urbanisme, de l’Aménagement des territoires et des Collectivités territoriales. Cette agence aurait pour mission de redéfinir les vocations des terres en identifiant clairement les zones agricoles, industrielles, résidentielles et forestières.
Préserver les terres agricoles et les forêts classées
L’un des axes majeurs de cette réforme concerne la protection des terres agricoles et des forêts classées. Amadou Ba alerte sur l’urbanisation incontrôlée qui menace les meilleures terres cultivables du pays. Il plaide pour une interdiction stricte de toute délibération foncière sur ces espaces stratégiques. « On a identifié les meilleurs sols, on ne peut accepter que des gens les bétonnent », a-t-il martelé.
Concernant les forêts classées, il propose « la mise en place d’une classification rigoureuse afin de prévenir leur destruction au profit de projets immobiliers ». Cette mesure vise à préserver l’équilibre écologique et à assurer une gestion durable des ressources naturelles.
Le député insiste également sur l’importance d’une planification à long terme des grands projets d’infrastructures. Il prend en exemple le futur projet ferroviaire reliant Dakar à Bamako, soulignant la nécessité de sécuriser en amont les terrains nécessaires. « Si on ne fait rien, les gens vont s’accaparer du foncier sur le site. L’État devra ensuite payer des impenses, alors qu’on peut l’éviter », avertit-il.
Pour lui, « il faut délimiter dès maintenant les tracés des futures autoroutes et voies ferrées, installer des repères physiques et d’interdire toute construction sur ces zones. Une telle anticipation permettrait de réduire les coûts et d’éviter les conflits fonciers lors du démarrage des travaux ».
Pour rendre la gestion du foncier plus efficace et transparente, Amadou Ba plaide pour la mise en place d’une cartographie numérique accessible à tous. Ce système permettrait aux investisseurs nationaux et étrangers d’identifier rapidement les terrains disponibles pour l’agriculture et l’industrie. « Il faut définir les zones industrielles de sorte que même les investisseurs étrangers puissent, en un clic, identifier des terrains de plusieurs hectares disponibles », explique-t-il.
Cette modernisation viserait à faciliter l’investissement, améliorer la transparence et réduire les spéculations foncières, qui freinent le développement du pays.
Avec cette proposition de loi, Amadou Ba ambitionne de poser les bases d’une réforme foncière profonde et structurée, qui garantirait une gestion plus équitable et stratégique des terres. En suspendant temporairement la compétence des collectivités locales en la matière, il souhaite donner à l’État les moyens de mieux planifier le développement du territoire et d’attirer des investissements durables.
Cette réforme, si elle est adoptée, marquera un tournant décisif dans l’aménagement du Sénégal.
Raune